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C’est le « mal du siècle ».

Des millions de personnes sont touchées.

Moi-même, je suis déjà tombé une fois dans le piège… et la rechute n’est jamais loin.

Seuls les retraités semblent épargnés… mais pour combien de temps ?

Ce fléau, c’est d’être débordé… et de s’en vanter !

Il n’y a pourtant pas de quoi être fier !

Voici une conversation typique de l’année 2017, entre deux amis :

– Salut, ça fait plaisir de te voir ! Comme ça va ?

– Ca va, mais c’est la folie en ce moment, je suis débordé de partout.

– Ah oui je comprends, c’est la même chose pour moi, je n’ai plus une seconde à moi.

Alors bien sûr, il nous est tous arrivé de connaître des moments d’activité intense.

Mais ce qui est nouveau, c’est que c’est devenu un mode de vie… dont les gens sont fiers !

Pourquoi ? Eh bien parce que c’est une façon de se donner de l’importance !

C’est ce que des sociologues viennent de montrer [1], dans une enquête éclairante.

Ils ont interrogé des centaines de personnes… et se sont rendu compte d’une chose étonnante.

Ceux qui travaillent comme des fous ne sont pas jugés fous, bien au contraire.

Ils sont désormais considérés comme des gens « importants », ayant un « statut élevé » !

Et du coup, beaucoup de gens se déclarent débordés… pour se mettre en valeur !

Un renversement historique… et dramatique

C’est un retour en arrière sidérant !

Dans la Grèce antique, ou au siècle des Lumières, c’était le loisir qui était valorisé, pas le travail.

Le loisir grec (« scholé ») n’était pas du divertissement : c’était un état de disponibilité et de paix.

Les gens « importants » étaient donc ceux qui avaient du temps : pour penser, méditer, ou pour se consacrer aux autres via des activités sociales ou associatives.

L’origine du mot travail (labeur) était même synonyme de « tourment » et de « torture » !

On plaignait les « forçats » qui travaillaient 15h sur 24, 7 jours sur 7.

Aujourd’hui, c’est l’inverse : si vous répondez à vos e-mails du bureau le soir ou le week-end, c’est vous qui êtes valorisé !

Même au beau milieu des vacances, un coup de fil urgent de votre chef peut tomber à pic : car c’est la preuve éclatante de votre importance – c’est le signe que votre entreprise ne peut pas se passer de vous, et que vous avez de grosses responsabilités !

La recette anti-bonheur

Pourtant, ai-je besoin de préciser qu’être débordé est le meilleur moyen de se rendre malheureux ?

Je ne parle même pas du risque de « burn-out » (épuisement professionnel).

Même si votre santé « tient le choc », le risque est que vous passiez à côté de votre vie !

Car le bonheur durable n’est pas l’adrénaline incessante de l’urgence et des responsabilités.

Le vrai bonheur, c’est passer du temps avec ses amis, sa famille… faire une marche méditative dans la nature… et apprécier la beauté de chaque instant !

Cela paraît évident quand on le dit comme ça, mais on a tous tendance à l’oublier !

Comme le dit si bien le Pr Kabat Zinn, grand spécialiste de la méditation en pleine conscience :

« Il est tellement facile de regarder sans voir, d’écouter sans entendre, de manger sans rien goûter, de ne pas sentir le parfum de la terre humide après une averse, et même de toucher les autres sans être conscient des émotions que l’on échange. » [2]

Le vrai bonheur, c’est de pouvoir être attentif, conscient de ce que l’on fait, de ce que l’on vit… plutôt que d’avoir le cerveau sur-stimulé par 10 pensées à la seconde, entre 3 e-mails et 2 SMS !

Voici donc ma bonne résolution pour 2018, et peut-être la vôtre si vous êtes concerné :

C’est d’essayer de « s’ennuyer » un peu !

Rendez ce service à votre cerveau !

Oui, je vous propose de redécouvrir l’ennui, comme nouvelle thérapie.

Comme le rappelle le Dr Patrick Lemoine, c’est un conseil qui vaut de 7 à 77 ans (et plus) :

« Quand je vois les parents de mes petits-enfants courir d’une leçon de piano à un entraînement de judo ou de tennis… sans parler des anniversaires qui laissent les maisons ravagées par une armée de gentils petits diables, je me dis que la nouvelle bible des parents : « vos enfants doivent sans arrêt être occupés, sinon vous êtes des mauvais parents », oui, je me dis que quelque chose ne fonctionne plus et qu’on a oublié les vertus de l’ennui et partant, de la paresse, de la cosse, du glandage, du farniente, de la rêvasserie.

Du coup je repense à mon enfance, aux interminables vacances chez mes grands-parents à la campagne où, n’ayant pas de petits camarades, pas de télévision, peu ou pas de jouets, je m’ennuyais, me barbais, me cassais les pieds, et pourtant, j’y repense avec une immense nostalgie

Je pense profondément que c’est en grande partie au cours de ces périodes où je m’ennuyais que je me suis construit grâce à mes rêves éveillés. C’est au cours de l’inaction que l’on pense, élabore, crée et c’est au cours de l’action que l’on applique ce qu’on avait imaginé en ne faisant rien. »

Voilà pourquoi le Dr Lemoine n’hésite pas à prescrire à ses patients « des cures d’ennui – ou de relaxation, méditation, mindfulness, yoga et autres (in)activités contemplatives ».

C’est une belle résolution, non ?

N’hésitez à me dire si vous êtes d’accord (ou pas d’accord), en commentaire de cet article !

261 commentaires

  • Francesca dit :

    Oui, d’accord sur le fond, mais il manque peut-être une vue politique du problème.
    Ne serait-il pas judicieux de faire la différence entre les loisirs et l’oisiveté ; les loisirs vont de pair avec le salariat ; l’oisiveté était le fait des hommes libres (par opposition aux esclaves)
    Ni dans la Grèce antique ni dans le monde actuel ne s’ennuie qui veut !

  • monique dit :

    j’ai 83 ans et fille unique je me souviens des longs moments que je ne savais comment remplir je m’en souviens avec « plaisir » j’ai eu 2 filles et nous étions 3/4 du temps à la campagne assez esseulés
    l’une des filles pouvait rester des heure à contempler un nid defourmis et l’autre ne cessait de répéter « je m’ennuie, je ne sais pas quoi faire » et pourtant aujourd’hui elles en parlent toues 2 comme d’un bon souvenir !

  • Cuozzo dit :

    Merci de nous rappeler les choses importantes de la vie. À rien ne sert de courir en Zig-zag sans trop réfléchir lorsque une saine et sereine promenade, en ligne droite, bién pensée mène au même point en un temps équivalent.
    Je ne suis pas sans reproche, loin s’en faut, je regrette de ne pas l’avoir compris plus tôt.
    Bonne année à vous aussi.

  • Fritz dit :

    Je ne fais rien, je suis très bon à cela… Et je tiens un journal. Et si je passe une journée sans l’écrire, après 48h, je ne me souviens pas de ce que j’ai fait, tellement les jours se ressemblent.
    J’étais parisien, ça a fini par me lasser.
    Je suis parti vivre avec ma femme en Normandie au bord de la mer. On se baigne entre mai et octobre, j’adore l’eau froide de la Manche, elle me rajeunit.
    A 67 ans, je suis à la retraite et je hais cette idée.
    Je suis intemporel et sans âge. ma représentation dans l’univers matériel n’a rien du vieux mais je n’aime pas non plus le jeunisme.
    Mais l’action, le mouvement découpe le temps. Quand il se passe des choses, ma mémoire est parfaite (Alors qu’on est tous dans la parano Alzheimer dès qu’on n’arrive pas immédiatement à mettre un nom sur la tronche d’un acteur qu’on connaît au ciné ou à la télé !).
    Les souvenirs plaisants du passé sont faits d’actions.
    Oui, j’ai aimé errer dans des villes étrangères seuls et vide de sens et d’identité et d’égo, jusqu’à ma propre rue que je pouvais regarder comme si je ne l’avais jamais vue. J’avais la capacité à ne pas savoir (Not Know things), à ne pas avoir ce petit décalage qui vous jette hors de la vie, celui de chacun muré dans un soi limité, qui doit à chaque instant de son existence lutter pour avoir raison.
    La vie est faite de jeu et d’absence de jeu, les deux sont intéressants.

  • LANNEVAL dit :

    Lacan disait déjà à son époque que le désir naît de l’ennui. Encore faut-il réfléchir pour que l’ennui débouche sur du désir.
    Cela n’enlève rien à la valeur travail qui me paraît indispensable dans la vie pour appartenir à un groupe, à une oeuvre commune. Mais qui doit laisser des plages de loisirs ou des moments d’ennui pour penser, réfléchir.
    Je plains ceux qui sont au chômage.

  • zibani dit :

    Bonjour
    je suis d’accord avec vous on est carrément dans le burn out.
    zibani fethi

  • Ponsard l dit :

    Je suis d’accord avec vous à 200%
    Je suis une mamie qui essaie d’inculquer cela à mes petits enfants. Gt

  • Mulesg dit :

    Bonjour,
    Merci pour cette lettre ! Quel plaisir à lire !
    Le pire c’est que le sentiment de culpabilité quand je ne ‘fais’ rien me semble être ‘normal’.
    Oui pour valoriser l’inaction !

  • ROGMEL Antoine dit :

    Je pense que l’ennui ne se commande pas. Personnellement je ne sais pas ce que c’est. Pendant mes moments de solitude , je suis envahi par toutes sorte de pensées, très variables suivant mon état de santé ou de fatigue, qui aboutissent toujours à une action visant à améliorer ma condition ou la faire oublier ne serais-ce que momentanément. Par exemple, je lis vos lettres et je suis abonné à trois de vos revues. Je passe heures à apprendre qu’il ne faut pas rester devant mon écran et rester oisif !

  • BEI dit :

    Tout à fait d’accord avec vous, le temps passe déjà si vite que se poser et ne rien faire c’est ralentir le temps, vive le farniente

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